PARU SUR BFM NORMANDIE :
SEINE-MARITIME: MOBILISATION CONTRE LE STOCKAGE DES DÉCHETS DES CHANTIERS DU GRAND PARIS
Célia Ngatsongo avec Florian Bouhot
Le 15/11/2022 à 19:49
- PartagerAnalyses à l'appui, une association d'habitants alerte sur la teneur en métaux des terres qui seront bientôt stockés à Bardouville.
Ce n'est, en principe, plus qu'une question de temps avant le début de la valse des camions. L'ancienne carrière de Marnes, qui jouxte les communes de Mauny et Bardouville (Seine-Maritime), accueillera dans les prochains mois des déchets "inertes" issus des chantiers d'un mégaprojet: celui du Grand Paris.
En tout, ce sont près de 400.000 mètres cubes de terres excavées par les tunneliers qui vont être stockées en Normandie. À moins que l'association "Les pieds dans l'eau - Bardouville en danger" ne mette un terme à ce projet.
Dès le départ peu favorable au stockage des déchets sur le terrain de la carrière, le collectif l'est encore moins depuis qu'il a sollicité l'appui d'un laboratoire pour analyser la qualité des terres d'ores et déjà amassées dans les communes voisines d'Yville-sur-Seine et d'Anneville-Ambourville.
Nickel, chrome, etc...
Les résultats semblent sans appel. Des taux d'arsenic 85 fois supérieurs aux normes autorisées ont été relevés, ainsi que du chrome, du nickel, du plomb ou encore du baryum.
Or "il y a un fort potentiel pour que cette terre qui arrive ici soit exactement la même qui arrive dans la carrière de Mauny, géographiquement située sur la commune de Bardouville", pointe Nathalie Haubert, présidente de l'association "Les pieds dans l'eau - Bardouville en danger".
"Parce que les terres qui viennent du BTP francilien partent toutes de deux endroits, que nous, association, on a identifiés, étaye-t-elle au micro de BFM Normandie. Donc, qu'on ne vienne pas me dire aujourd'hui: 'Mais non, ce n'est pas vrai, elles viennent d'ailleurs'. Toutes les terres sont mises ensemble, elles sont mélangées et sont stockées de côté parce qu'ils n'ont plus de place sur la région parisienne pour stocker ces terres. Donc, ce qui vient ici aujourd'hui viendra chez nous à Bardouville."
"Un danger pour Bardouville"
Comme d'autres habitants de Bardouville, Nathalie Haubert craint les possibles conséquences sanitaires et environnementales qui pourraient découler d'une pollution des cours d'eau et de la nappe phréatique.
"Ça représente un danger pour Bardouville, surtout pour les agriculteurs, pour les enfants aussi", soutient également Sofiane Tejmount. Interrogé par BFM Normandie, ce dernier estime que les déchets sont susceptibles de "ramener des maladies".
La situation n'a pas échappé à l'attention des différents élus locaux, au premier rang desquels on trouve Dominique Rousseau. Le maire de la commune est connu pour être une pourfendeur du projet, notamment en raison de l'afflux de camions qu'il engendrerait.
Le député Gérard Leseul (Nupes), pour sa part, affirme à Paris Normandie avoir d'ores et déjà sollicité le président de la Métropole de Rouen. Il compte en outre mettre le ministre la Transition écologique en lien avec les membres de l'association. Stéphane Martot, conseiller départemental écologiste, affiche également son soutien aux militants et peste contre les "défaillances du dossier".
La bataille se poursuivra au tribunal
Le ton est tout autre du côté de la préfecture de Seine-Maritime. On juge les résultats des analyses effectuées par l'association peu crédibles, arguant qu'ils n'auraient pas été obtenus à partir d'un procédé de lixiviation, une méthode nécessaire dans les études des sols.
De plus, répondent les autorités à France Bleu, "la teneur en métaux des terres apportées est une chose, mais le risque que l'on cherche à éviter est que les pluies successives emportent des métaux lourds contenus dans les terres apportées vers le sol sous-jacent".
Ce à quoi Nathalie Haubert rétorque: "On a respecté la loi de lixiviation. Cela nous fait gentiment sourire, on nous dit que ces métaux lourds ne sont pas solubles, mais on a la preuve que le baryum l'est". Aujourd'hui, elle demande davantange de traçabilité et de la transparence dans les contrôles.
Nouvelle preuve que le projet de stockage des déchets ne fait pas l'unanimité, un recours a déjà été déposé devant le tribunal administratif, de même que plusieurs plaintes. D'autres procédures pourraient suivre.
Célia Ngatsongo avec Florian Bouhot