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CHANTIER DU GRAND PARIS EXPRESS: LE DÉSARROI D'HABITANTS DE BONDY, BIENTÔT EXPROPRIÉS
Bettina de Guglielmo, Emmanuelle Binet et Gauthier Hartmann avec Djena Tsimba
Le 30/05/2022 à 12:36
La société du Grand Paris souhaite stocker sur l'emplacement de leurs maisons des gravats du chantier de la ligne 15.
Joanna et Didier habitent dans leur maison de Bondy depuis presque un demi-siècle. Le couple de propriétaires franciliens a construit sa vie ici, dans cette habitation entourée d'une végétation fournie et abritant un jardin.
Mais il y a deux ans, leur quotidien a été chamboulé par un simple courrier. Dans une lettre recommandé, ils ont été informés de leur prochaine expropriation à la demande de la société du Grand Paris.
"On a tout fait, 100% des travaux, tout est déclaré, tout est payé, tout est réglé, même les crédits c'est terminé, c'est payé. Dans ce cas-là, c'est quand c'est terminé qu'il faut partir", fustige au micro de BFM Paris-Ile-de-France, Joanna, assise devant sa maison aux côtés de son conjoint.
"Elle est dévastée"
Pour eux, l'échéance approche, ils devront quitter leur maison dans désormais six mois. Ces deux Bondysiens ne sont pas les seuls concernés par cette expropriation. De l'autre côté de la haie, la voisine de Joanna et Didier se retrouve dans la même situation. Âgée de 83 ans, elle habite pourtant dans son logement depuis plus de 20 ans.
Sa fille Lydia assure que la retraitée est rongée par cette expropriation à venir. Cette dernière n'a jamais songé à déménager et souhaite finir ses jours dans sa maison actuelle.
"Elle est torturée, dévastée. Au lieu de s'occuper de ses petits-enfants et puis de ses derniers jours sereinement, elle passe son temps à réunir des documents, à participer à des réunions de collectifs (...) C'est comme une déportation en fait, on vous dit, vous prenez vos valises et vous partez", regrette amèrement Lydia, auprès de BFM Paris Ile-de-France.
Si tous ces habitants sont visés par cette expropriation, c'est parce que la société du Grand Parix Express veut entreposer des gravats du chantier de la ligne 15 à l'emplacement de leurs maisons. Ce vaste projet de nouveau métro prévoit de desservir plusieurs villes de la petite couronne entourant la capitale. La partie est du projet, dont fait partie Bondy, doit voir le jour à l'horizon 2030.
Afin de permettre ces expropriations rapides, un plan d'urgence d'expropriation a été mis en place en 2018 par le gouvernement. Si aucun accord n'est trouvé avec des propriétaires, le juge peut prononcer une ordonnance d'expropriation et le bien est alors considéré d'utilité publique et ne peut plus être vendu, donné ou hypothéqué. Une procédure permet de raccourcir les délais. L'indemnité est elle est fixée par le juge.
Un recours d'associations
De leur côté, les associations de riverains sont favorables à l'arrivée du métro dans la ville de Seine Saint-Denis mais déplorent les méthodes de la société du Grand Paris.
Cinq associations ont déposé lundi dernier un recours en justice contre le préfet de Seine-Saint-Denis et la société du Grand Paris auprès de tribunal administratif de Montreuil. Dans leur communiqué, elles disent regretter le "mépris permanent" pour les riverains de la part des services de l'Etat et de la société du Grand Paris.
L'association Environnement 93 fait partie de celles qui ont déposé ce recours. Interrogé par BFM Paris Ile-de-France, son responsable Francis Redon soutient que des solutions alternatives plus avantageuses pour tous les parties sont pourtant envisageables.
"La surface cadastrale ici, elle est à peu près de 2500 m2, là-bas, on a à peu près 3300 m2. (...) C'est mieux qu'ici, largement mieux, et ça ne gêne personne", affirme-t il en pointant du doigt un autre terrain.
Les collectifs concernés par ce sujet ont également pointé du doigt le comportement des promoteurs. Ils suspectent la société du Grand Paris de vouloir revendre à la fin du chantier, les terrains expropriés à des prix plus chers que le montant des indemnisations proposé aux habitants.
"Il ne fait plus de doute que la promotion immobilière, nouvelle activité lucrative de la SGP, l’emporte sur la santé et le cadre de vie des populations", dénonce Environnement 93 sur son site Internet.
D'autres cas en Ile-de-France
D'autres problèmes vont aussi se poser à Bondy avec ce chantier. Une seule passerelle au dessus des voies ferrées permet aux personnes à mobilité réduite d'accéder aux commerce, mais celle-ci sera inaccessible en raison des travaux
"La surdité des services de l’Etat, l’obstination de la Société du Grand Paris accentuent la crise de confiance autant que l’incompréhension des citoyens face aux décisions des instances de pouvoir et à leur perception dans les territoires", regrettent les associations dans un communiqué.
Avec les grands projets de construction de futures lignes du métro, la question des expropriations de propriétaires pour les besoins des chantiers se pose de plus en plus en Ile-de-France. Le cas de Bondy est loin d'être isolé. A Rosny-sous-Bois en Seine-Saint Denis, 25 propriétaires des rue Jean-Mermoz et Philibert Hoffmann sont aussi dans l'obligation de quitter leur logement d'ici la fin de l'année.
Dans les autres départements, d'autres particuliers mais aussi des commerces, des entreprises ou des écoles sont visés notamment au Kremlin Bicêtre, à Clamart ou encore à Ivry.