Les habitants du nord-ouest 77 qui croulent sous les ordures du Grand Paris apprécieront-ils la remarque de l’architecte Roland Castro, pas si sûr :
« Faire d’une décharge un lieu de poésie majeure, quelle mutation géniale ! Voilà une initiative privée d’intérêt public menée en bonne intelligence avec les élus de terrain. Cette manière de faire permettra de transformer les quartiers les plus moches du Grand Paris »
Villeneuve sous Dammartin, village rural de moins de 700 âmes, situé près de l’aéroport de Roissy, qui a pour maire Gilles Chauffour.
C’est une de ces communes rurales françaises qui a vu de décennies en décennies disparaître ses petits commerces, avec peu de transport en commun, un désert médical : Sos Médecins ne s’y déplace plus et l’hôpital le plus proche en 77 se trouve à plus de 25 kms.
Un village très endetté, en 2017 l’endettement par habitant était de 2 265 € alors que la moyenne nationale pour le même type de commune était de 610 €. (1)
C’est là qu’ECT a choisi d’implanter son siège social dans le château et la plus importante décharge de déchets inertes d’Europe sur 130 hectares d’espaces agricoles.
Ce sont 600 à 700 camions qui viennent de jour comme de nuit, 6 jours sur 7, déverser leurs ordures, près de la Biberonne, affluent de la Beuvronne, rivière qui se rejette dans la Marne en amont proche du plus important captage du 77 qui fournit en eau potable près de 500 000 habitants.
Mais ce 25 janvier 2019, les associations environnementales ne sont pas les bienvenues, la pollution de l’air, de l’eau et des sols n’est pas à l’ordre du jour.
C’est en quelque sorte « une petite réunion entre amis » dont le but commun, semble-t-il, est de pouvoir se débarrasser des déchets du Grand Paris.
Afin de faire "avaler la pilule" aux populations, un architecte devrait
réaliser un aménagement paysager, presque « une œuvre d’art ».
La préfète Béatrice Abollivier avait fait le déplacement du bout de la Seine et Marne pour inaugurer sous la neige cette « œuvre », accompagnée du député de la circonscription Rodrigue Kokouendo (En Marche)
Le nouveau député qui semble comme son prédécesseur, Yves Albarello, être favorable à la réception de déchets sur sa circonscription et nous le regrettons.
Paru dans le Moniteur :
Antoine Grumbach ouvre l’œil du Grand Paris
Laurent miguet | le 25/01/2019 | Grand Paris, Terrassement, Roland Castro
Chapeau à large bord au-dessus d’un grand manteau pourpre, la silhouette d’Antoine Grumbach se détache du brouillard et de la neige dans le jour naissant et humide, comme celle d’un génie bienfaisant. Derrière lui au bord d’un trou invisible de 30 m de profondeur, la préfète de Seine-et-Marne et les élus locaux, invités de l’entreprise ECT, apportent une dose de pompe républicaine inhabituelle, dans le plus grand centre de stockage de déchets inertes de France et d’Europe, qui couvre 130 hectares et accueille près de 2 millions de t/an.
Land’Art métroplitain
Dans le barnum aussi blanc que la neige et le brouillard, la petite troupe se rassemble avant le dévoilement de la plaque inaugurale et la plantation du premier cil des Yeux du ciel, pièce maîtresse d’une série d’une douzaine de belvédères, situés à une trentaine de km du centre de la capitale, et par lesquels Antoine Grumbach tente de répondre à la question qui le taraude : « Qu’est-ce que le Land’art métropolitain » ?
En 2024 de part et d’autre de ce premier cil matérialisé par un chêne vert, deux yeux contrastés, de 400 m de long sur 170 m de large, regarderont les passagers des avions en voie d’atterrissage à Roissy, ou juste après leur décollage : le plus proche de l’aéroport prendra la forme d’un trou, et le second d’une colline. La composition végétale de l’œuvre lui donnera la propriété de changer de teinte avec les saisons.
Sur 9 hectares, les Yeux du ciel offriront à l'agglomération de Roissy des espaces récréatifs, culturels et sportifs.
Antidisney
Depuis la surface, les géoglyphes prendront la forme de parcs dont les populations locales définiront les usages : promenades, expositions, observatoire du ciel… Les yeux de l’enchanteur Grumbach pétillent à l’évocation de cet « antidisney » du futur dont il puise l’inspiration à l’aube de l’humanité : Stonhenge et Nazca, les sites des géoglyphes protohistoriques du Royaume-Uni et du Pérou.
700 à 800 camions quotidiens alimentent le chantier nuit et jour : « Quatre Kheops par an », calcule le land-artiste. Ils proviennent principalement des chantiers immobiliers environnants, et bientôt des tunneliers du Grand Paris express, dont la ligne 17 passera à 1 km de Villeneuve-sous-Dammartin. En plus du matériau et des engins d’ECT, Antoine Grumbach peut compter sur une jeune recrue de son commanditaire : l’exploitant du site a embauché Antoine Merrien à la fin 2018, jeune diplômé de l’école du paysage de Versailles. Sur lui repose le chiffrage du projet, annoncé pour ce premier trimestre 2019……
De l’eau au moulin de Roland Castro
« Je vous présente un géo-architecte qui voit du ciel » : autre urbaniste et militant historique du Grand Paris présent ce matin, Roland Castro confirme le souffle poétique d’une inauguration singulière. Avec sa gouaille optimiste, républicaine mais peu préfectorale, l’auteur du récent rapport remis au président de la République sous le titre « Du Grand Paris à Paris en grand » n’a pas barguigné pour rendre hommage au concepteur comme au maître d’ouvrage :
« Faire d’une décharge un lieu de poésie majeure, quelle mutation géniale ! Voilà une initiative privée d’intérêt public menée en bonne intelligence avec les élus de terrain. Cette manière de faire permettra de transformer les quartiers les plus moches du Grand Paris », s’enthousiasme l’ami……..
https://www.lemoniteur.fr/article/antoine-grumbach-ouvre-l-il-du-grand-paris.2017335